Après avoir passé  4 jours à attendre la réouverture du paso Cristo redentor reliant l’argentine au Chili, j’embarque enfin pour la folle traversée de la cordillère des Andes.Installée au premier rang du bus, j’y étais mieux qu’au cinéma !

A plus de 3000 mètres d’altitude, le passage de frontière y est assez particulier et prend une légère allure d’un séjour en garde à vue : « tout le monde en ligne, vos bagages devant vous ! », Paff, les carabiniers donnent le ton. Deux chiens vont et viennent entre les valises et les voyageurs. La guerre aux fruits et légumes est déclarée comme nous l’indique la pancarte avec une jolie pomme barrée et des menottes : une belle excuse pour nous passer au peigne fin plusieurs heures, un par un, bagage par bagage à la recherche du moindre trognon de pomme, de la moindre trace de miel (même dans les produits cosmétique), ouiiii  le Chili protège son « patrimoine naturel ».   
 

Je vois petit à petit les drapeaux chiliens remplacer les drapeaux argentins et de plus en plus l’impression de m’éloigner de mon Chili imaginé. Où suis-je ? A Rio de Janeiro ? A Porto ? Deux villes que je ne connais absolument pas mais qui me laisse à les penser ainsi.
Je suis  à Valparaiso, Valpo disent les portenos(ceux d’ici, pas les portenos de Buenos aires !) Une ville aux 46 collines qui se dresse comme un amphithéâtre regardant le pacifique.
Une ville tombée dans une palette de couleurs  ce qui lui donne certainement une part de son charme, une part de magie, une part de poésie.
Une ville où les rêveurs, les amoureux, les révoltés se sont emparés des murs pour y inscrire une pensée ou un mot d’ordre. Une ville qui inspire et aspire ses habitants, les voyageurs et les passants.

A Valparaiso, La vie se fait au coin d’une rue, sur le palier d’une porte ou bien devant une échoppe. Dans les escaliers, on y philosophe, on y joue de la musique, on trinque, on s’y dispute, on s’y embrasse. Quelques ascenseurs et passages étroits relient les ruelles du haut de la ville à celles du bas de la ville. La rue est pleine de vie, la rue respire, la rue est là pour te rassembler.

 Historiquement, Valparaiso était le plus grand port de toute l’Amérique du Sud et la  première terre d’accueil des marins, des navigateurs après quelques mois en mer. Son allure joviale, bonne vivante et festive est encore très présente et appréciée. La ville est aussi très investie au niveau culturel, l’ancienne prison a été transformée en un grand parc culturel et y propose régulièrement des concerts, des expos.
Valpo bouge, Valpo danse, Valpo chante, c’est pour moi l’occasion d’agrandir mon répertoire musical de groupes chiliens. Les expressions chiliennes remplacent « le vos, le che »argentin pour « si po, weibon, bakan et le catchai  »qui viennent maintenant ponctuer les phrases . Mon espagnol emprunte des expressions à l’un, à l’autre mais avec une tonalité toujours bien française, eheh !!



Je profite d’arriver à Valparaiso fin janvier en haute saison pour y travailler un peu. Je dépose quelques CVs puis quelques jours plus tard je commence le service dans un restaurant de fruits de mer  dans un village côtier. Le travail y est assez intense, nous sommes entre 7et 12 serveurs chaque jour, ça me change de mon petit resto de Cordoba.
Bosser dans un resto reste un bon moyen pour connaitre la gastronomie locale, j’y goute des spécialités chiliennes et découvre pleins de sortes de fruits de mer qui m’étaient jusque là inconnues et que je ne peux traduire en français. Bien que les gérants du resto soient d’abominables escrocs, sans foi ni loi (oui oui tout ça à la fois), on se la passe cool avec les collègues, on rigole beaucoup et on apprend à travailler ensemble.

Le village est à 1h en bus de Valparaiso : Quand je paie le ticket au chauffeur j’ai l’impression de détenir THE ticket et de partir en voyage dans le bus magic. Je remarque que je prends très vite quelques habitudes, je m’assois toujours du côté gauche du bus à l’aller et du côté droit au retour de façon à avoir le nez bien collé à la vitre et ne pas perdre une miette du spectacle qui défile derrière la vitre. J’y vois la côte pacifique se faire mal menée par de fortes vagues qui viennent se casser sur les gros rochers, j’y vois les dunes de sable de ConCon (le pila chilien) dominer la falaise. Le chauffeur donne l’ambiance : cumbia, reageeton, c’est lui le DJ, parfois, j’ai même le droit à la lumière disco !
 A bord du bus magic, y défile aussi les vendeurs de glaces, de piles, de pansements, de bouquins ou de coupe-ongles : chaque vendeur a à peu près 3 minutes montre en main pour vendre sa marchandise, les musiciens embarquent parfois à bord de ce bus et ça c’est top !



 A Valparaiso, je fais aussi du volontariat dans une auberge, en échange d’un lit et d’un petit déjeuner. Très bonne ambiance au PataPata Hostel tenu par un couple d’artiste Chilien et leurs 3 enfants, Elle peint, Lui fait de la musique.  L’hostel se trouve dans l’une des rues très touristique de la ville, en haut du cerro alegre, l’un des plus charmant. C’est l’occasion de me remettre tranquillement à l’anglais et de prendre le temps de me perdre un peu ici.
J’y rencontre beaucoup de gens, beaucoup de voyageurs qui passent 3, 4 nuits et poursuivent leur route. Des voyageurs marquent plus que d’autres, manquent plus que d’autres. C’est la dure vie du réceptionniste, les voyageurs passent un bon moment ici, puis, reprennent  leur sac. Et le lendemain, d’autres arrivent, le schéma se poursuit. La réception, c’est dégager un certains investissement, une certaine énergie pour des rencontres éphémères.
Ca a été chouette un temps, mais je me rends compte que j’ai de moins en moins envie d’aller à la recherche de cette rencontre si courte. Du moins, elle est beaucoup plus agréable quand c’est moi qui prends mon sac que quand je reste sur le seuil de l’hostel à dire au-revoir et bonne route aux voyageurs.